Ce trawler nous court après depuis un moment. Il va un peu plus vite que nous, donc il finira bien par nous doubler. Mais un petit peu seulement, et donc ça fait sans doute deux heures que nous le voyons se rapprocher. Il doit commencer à vouloir en finir, mais nous ne ralentirons pour le laisser passer que quand il sera tout près – ou quand il nous appellera par la VHF. Mais tout à coup, retournement de situation…

A un détour de la rivière, apparaît soudain un pneumatique des Coasts Guards. Sur le canal 16, on les entend interpeller un bateau, et je vois notre poursuivant s’arrêter dans notre sillage, les Coasts Guards se rapprocher d’eux. Bref dialogue à la radio, les voilà bons pour un contrôle.

Pendant ce temps, nous filons, en espérant passer sous le radar. Non pas que nous ayons grand chose à craindre, nous sommes en règle sur tout, et plutôt deux fois qu’une. Mais l’étape est longue, et on ne sait jamais.

A la jumelle, tandis que Nelly conduit, je suis la situation, et au bout d’une demi-heure, j’aperçois le pneumatique qui repart à toute vitesse… dans notre sillage. Ils se rapprochent, et ça ne manque pas, ils nous appellent par la radio :
– Magic, quelle a été la dernière fois que vous avez été contrôlés par les Coasts Guards ?
– Nous n’avons jamais été contrôlés par les Coasts Guards jusqu’ici.
– Merci Magic, je vais vous demander de vous mettre en avance lente, et nous allons vous aborder pour un contrôle.
– Magic, bien compris. En avance lente, vous pouvez nous aborder sur notre bâbord.
– Magic, do you carry weapons on board?
– No, we do not.

Ils sont deux à monter à bord. Très courtois, très précis, et tout se passe très bien. Paperasse sur un formulaire rempli à la main – on n’en est pas encore aux boitiers de commande des serveurs de restaurants branchés, ou à la machine portable du technicien qui fait la maintenance de la chaudière. Une seule remarque : un de nos extincteurs n’a pas atteint sa date limite de péremption, mais il affiche une pression limite : à changer à la première occasion.

Pendant ce temps, notre poursuivant nous double, en rigolant sans doute.

Contrôle fait, papier signés, toute l’équipe repart devant nous, et nous suivons à notre allure… Bientôt, un yacht de luxe nous rattrape dans une grande gerbe d’écume – heureusement assez loin. Nous pensons bien fort : celui-là va dans la gueule du loup… Effectivement, ça ne rate pas, un peu plus loin, le voici à l’arrêt, avec un pneumatique aux fesses, dérivant mollement tandis que nous passons dignement, mais en rigolant…

La prochaine fois, nous pourrons dire que nous avons été contrôlés le 1er Avril, et que ce n’est pas une blague.